Une histoire d'imperméable ramassé dans la rue le conduit en prison.

Esaïe DAAGUE Journaliste - chroniqueur judiciaire

​​On est dans l’arrondissement de Vidolé dans la commune d’Abomey, plus précisément au quartier Lego. Augustin et Jean deux frères âgés respectivement de 23 ans et de 21 ans, après de longues heures de prières tard le soir, se sont assoupis dans leur Eglise. Une Eglise construite en matériaux définitifs et dont les portes sont en fer.
 
​Au petit matin, Augustin et Jean constatent que la porte en fer de l’Eglise a été défoncée et que leurs téléphones portables ainsi que quelques-uns de leurs vêtements enlevés ont disparu, notamment un imperméable de couleur rouge.
 
Choqués par le cambriolage de leurs biens dans ce lieu sacré, Augustin et Jean décident de porter plainte et se rendent au commissariat de police de leur arrondissement. Le ou les voleurs ne seront cependant pas retrouvés.
 
Un mois plus tard, un matin, alors que Jean accompagnait leur son père Faustin en ville, ils tombent sur un homme vêtu d’un imperméable rouge, un imperméable de la même couleur que le leur. Il ne pleut pourtant pas. Cet imperméable ressemble étrangement à celui qui leur a été dérobé dans la nuit du dimanche 13 au 14 août 2023. C’est celui qui leur a été dérobé ! Sûr et certain. La marque de la brûlure de l’échappement y est. Jean et son père ne tardent pas à saisir l’homme à l’imperméable et à le questionner.

​Où as-tu trouvé cet imperméable ?
 
Je l’ai ramassé par terre dans la rue, il y a quelques jours.
 
La réponse ne les convainc pas. Jean et son père tiennent là le voleur de l’Eglise. Ils le conduisent aussitôt au commissariat de Vidolé.
 
Placé en garde à vue, Gaston, nous l’appellerons ainsi, nie tout en bloc. Ce n’est pas lui le voleur. Il n’a rien volé, il n’a fait que ramasser un imperméable dans la rue et pour se protéger de la fraîcheur matinale, il l’a porté ce jour-là.
 
Gaston ne réussit pas non plus à convaincre les policiers et il est déféré devant le procureur de la République qui le place sous mandat de dépôt en attendant son jugement.
 
En prison, Gaston fait deux crises et est conduit au centre hospitalier départemental du Zou pour des soins. Gaston a visiblement une santé fragile. De petite taille, il est frêle, peut-être maigre.
 
A l’appel de son dossier ce jeudi 19 octobre 2023 aux environs de 15h, Gaston avance difficilement vers la barre.
 
Gaston est âgé de 45 ans, marié et père de deux enfants l’un de 15 ans et l’autre de 11 ans. Mais, ni sa femme, ni ses enfants ne sont présents à l’audience.
 
Après avoir rappelé les faits, le président lance :
 
- Les personnes ici présentes vous accusent d’avoir volé deux téléphones portables et des effets vestimentaires dont un imperméable que vous portiez lors de votre arrestation. Reconnaissez-vous les faits ?
 
- Non, je ne les reconnais pas.
 
- Comment expliquez-vous alors que l’imperméable leur appartenant se retrouve sur vous ?
 
- Je l’ai trouvé dans la rue.
 
- Est-ce dans vos habitudes de ramasser tout ce que vous trouvez dans la rue ?
 
- Non, répond Gaston.
 
- Et pourquoi avoir ramassé cet imperméable en particulier ?
 
- Le visage triste, Gaston répond : Je ne savais pas que cela allait me conduire jusqu’ici.
 
Le président demande au procureur s’il a des questions à poser au prévenu.
 
Le procureur interroge Gaston : Avez-vous un travail ?
 
Gaston répond qu’il travaillait dans une société de gardiennage mais qu’il a perdu son emploi et est au chômage.
 
Le procureur lui demande alors comment il fait pour nourrir sa famille.
 
Gaston ne donne aucune réponse.
 
C’est alors que le président du tribunal s’adresse aux victimes en leur demandant ce qu’ils souhaitent. Celles-ci disent souhaiter que justice soit faite.
 
Dans ses réquisitions, le procureur de la République demande la condamnation de Gaston à trois mois d’emprisonnement ferme.
 
Le président le condamne à 6 mois d’emprisonnement dont 2 fermes et 4 assortis de sursis avec mandat de dépôt en lui précisant : « cela vous apprendra à ne plus ramasser les objets d’autrui par terre ».
 
En entendant ce verdict, Augustin, Jean et leur père ont l’air satisfait, presque joyeux. Mais le reste de la salle est plutôt perplexe. Le public a l’air de douter encore de la culpabilité de Gaston, mais aussi de craindre le pire pour lui en prison, compte tenu de sa santé si fragile.

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