Premier jour du mois d’avril à Nikki. Il sonne environ 18h 45. Yarou, la quarantaine d’âge revient de la ville. Ses deux épouses se précipitent pour lui souhaiter la bienvenue. Yarou répond à leur salutation. Il ne les voit cependant pas encore prêtes pour la prière, ni en train de s’y préparer bien que l’heure soit proche. Le polygame fait injonction à ses épouses tous travaux cessants de se préparer pour la prière qu’elles ne doivent pas manquer. En bonne épouse la première femme laisse tout tomber, fait rapidement son ablution et se met à prier. A l’inverse, la deuxième femme reste indifférente aux ordres de l’époux.
La prière terminée, la première épouse échangeait à la porte de sa chambre avec une voisine passée la voir. La seconde épouse, de sa chambre les remarque et pique une colère à les voir ainsi échanger toutes les deux. Ne supportant pas pour longtemps cette complicité entre les deux femmes, elle sort les affronter et se met à hurler qu’elle se mettent ensemble pour la dénigrer. Les deux amis ne s’occupant pas d’elle, sa colère devient plus virulente. Elle impose à l’amie de sa coépouse de vider les lieux. Mais celle-ci ne s’exécute pas. Les deux amis l’ignorent et continuent dans leur papotage. Furieuse, elle bondit de chez elle pour venir mettre hors d’habitation l’amie de sa coépouse. Sa coépouse s’interpose. La deuxième épouse se met à la taper. Et comme si cela ne suffit pas, se saisit d’une lame et lui déchiquète le corps. Les appels au secours de l’amie de sa coépouse alerte le voisinage qui arrive à maitriser la femme déchainée et en furie. Le mari qui trainait dehors après la prière, avertit, se précipite au foyer et conduit sa femme ensanglantée au centre de santé. L’autre femme est interpellée par la police et conduite au commissariat. Présentée au procureur, elle est placée sous mandat de dépôt. Au bout d’une semaine de séjour carcéral, elle comparait au tribunal de Parakou le 18 avril dernier. Assise en première loge sur le banc des prévenus, Foussénatou on l’appellera ainsi, était très remarquable dans la salle. Seule femme parmi les prévenus, son petit enfant qui réclamait sa liberté dans la salle par des cris qu’il poussait les faisait vite remarquer. A l’appel de son dossier, Foussénatou se lève, portant l’enfant dans ses bras. Sa coépouse aussi était présente. La prévenue est la première appelée à la barre. Le président : Mme vous êtes accusé de coups et blessures sur votre coépouse et d’agression verbale sur elle et son amie reconnaissez-vous les faits ? Foussénatou : Oui, c’est vrai. Je reconnais avoir porté sur ma coépouse des coups après les avoir agressées verbalement, elle et son amie. Mais c’est elles qui m’ont provoqué. Président : Qu’ont elles fait pour vous provoquer. Foussénatou : Ma coépouse a invité sa copine et sous mon nez, elles se sont mises à parler de moi, à me critiquer. Président : Ah bon ? qu’ont-elles dit ? Foussénatou : Ma coépouse dit à son amie que je suis une femme insoumise. Que je ne respecte pas les consignes de mon mari. Elle lui a aussi dit que je n’aime pas prier. Elles font des commentaires et rient de moi. Le procureur s’ingère dans le questionnement de la prévenue. Procureur : Madame, où étiez-vous au moment où les deux amies causaient. Foussénatou : J’étais dans ma chambre. Procureur : êtes-vous sûre d’avoir bien capté les mots de leur causerie ? Foussénatou : Oui je suis sûre. Le président invite alors sa coépouse Nimatou on l’appellera ainsi, à monter la barre. Président : Que s’est-il passé madame Nimatou ? Nimatou raconte les faits comme cela s’est passée et insiste : Ma copine et moi n’avons pas évoqué le nom de ma coépouse encore moins, fait allusion à un fait la touchant. Je suis désolée. Ma coépouse s’est laissé aller dans son imagination, malheureusement mauvaise, qui nous a conduite ici. L’amie de Nimatou à la barre dit exactement la même chose que Nimatou. Foussénatou est alors invitée de nouveau à monter la barre. Président : C’est votre parole contre les deux. Quelle preuve avez-vous concrètement pour nous persuader de vos allégations ? Foussénatou : Je n’en ai pas. Alors le procureur lui demande - savez-vous que nul n’a le droit de se faire lui-même justice ? Même si vous avez des preuves contre ces dames, pensez-vous que vous êtes en droit de vous rendre justice vous-même ? Foussénatou : Désolée, j’ai agi sous l’effet de la colère. Je regrette mes actes. Le président demande si le mari des protagonistes est là. Président : Monsieur après ces faits je crois que vous comprenez que vous devez séparer vos épouses pour leur sécurité. Et surtout vous devez les mettre à égales conditions de vie. En vous mariant à deux femmes, c’est que vous êtes capables de bien les traiter et équitablement. Le procureur : Vous devez respecter ces consignes pour éviter que tel drame qui heureusement a vite été maitrisé ne se reproduise plus. On ne sait jamais, vous n’êtes pas là en pleine nuit, vous imaginez ces deux femmes livrées à elles-mêmes sous l’effet de la colère ? Le pire peut vite arriver. Soyez prudent. Si une telle situation advenait encore on va vous condamner aussi. Après ces mises en gardes, le procureur demande que dame Foussénatou soit retenue sous les liens de coups et blessure volontaires et soit condamnée à 12 mois d’emprisonnement avec sursis et à 100 000 franc d’amende. Le président condamne dame Foussénatou à six mois d’emprisonnement avec sursis et à 100 mille d’amende. Kolawolé BIAOU Journaliste - chroniqueur judiciaire LEGIBENIN |
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Décembre 2024
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