Le poulailler de Franklin se trouve dans la grande concession familiale. Dans cette concession vivent plusieurs membres de sa grande famille, des frères, des cousins, des oncles et des tantes. Dans le poulailler de Franklin, il y a beaucoup de poulets. Son élevage marche bien puisqu’il prend bien soins de ses gallinacées. Les ventes de poulets se succèdent. L’affaire prospère. Mais ceci n’est pas forcément vu d’un bon œil par tout le monde. Il y a des jaloux. Une nuit, alors que les uns et les autres sont dans les bras de morphées ; aux environs de 2h du matin, un homme de la concession se glisse dans le poulailler de Franklin et s’emparent de deux poulets avant de se retirer discrètement dans son logement. Franklin qui avait le sommeil difficile cette nuit, alerté par quelques caquètements, n’a pas raté une miette des faits et gestes de Didier. Didier est un homme âgé de 50 ans environ. Il n’a pas un travail précis. Il se débrouille plutôt et arrive difficilement à nourrir sa famille. Didier vit dans la grande concession familiale et il pense pouvoir se servir des poulets de Franklin pour alimenter sa famille mais aussi pour réduire progressivement cet élevage qui prospère et dont il est jaloux. Au petit matin, une fois dans son poulailler, Franklin constate la disparition effective de deux poulets. Il interpelle aussitôt Didier en lui demandant de lui remettre ses poulets qu’il a pris dans la nuit aux alentours de 2h du matin. Didier ne reconnait pas les faits. Une dispute éclate entre les deux hommes. L’un soutient avoir vu l’autre lui voler deux poulets et l’autre nie tout en bloc, accusant celui qui l’accuse de vol de lui vouloir du mal. Sans désemparer, Franklin réclame ses deux poulets. C’est alors que Didier rentre dans son logement pour en ressortir avec les deux poulets qu’il égorge aussitôt devant Franklin. En colère, et s’étant senti complètement nargué par Didier, Franklin se rend immédiatement au commissariat pour porter plainte. Didier est interpellé, déféré devant le procureur de la République, puis placé sous mandat de dépôt en attendant son jugement. A l’ouverture de l’audience ce lundi 26 février 2024 à 14h, la salle pleine à craquer. A l’appel du dossier de Didier, le président lance à celui-ci : Monsieur, vous êtes accusé d’avoir volé deux poulets que vous avez ensuite égorgé, reconnaissez-vous les faits ? - Didier : Oui - Président : Qu’est-ce qui vous a poussé à vous comporter ainsi ? - Didier : C’est la jalousie. - Président : Alors que quand vous étiez libre, vous n’arriviez pas à nourrir votre famille, qu’en sera-t-il donc quand vous serez en prison ? - Didier : Non - Président : Moi, je ne vous comprends pas, c’est vraiment bizarre. Quand vous-même, vous analysez les faits, trouvez-vous normal de se comporter comme vous l’avez fait ? Vous avez volé et vu par le propriétaire des poulets qui les réclame. Et, vous avez l’audace de sortir les poulets et de les égorger devant leur propriétaire. - Didier : Je ne savais pas ! Le président demande au procureur s’il a des questions à poser au prévenu. Procureur : NON, ça peut aller ! Le Président demande à Franklin de monter la barre. Elancé, teint noir, Franklin s’approche et monte la barre. Son allure reflète une certaine sérénité. - Président : Que voulez-vous qu’on fasse ? - Franklin : Non, je ne veux plus rien. Je demande de le laisser. Nous sommes de la même famille. - Président : Que toute la salle m’écoute. Pour ce qui concerne de garder quelqu’un en prison ou de le laisser, cela ne relève pas de votre pouvoir. Si vous venez ici et qu’on vous demande ce que vous réclamez ; vous allez dire ce que vous voulez que le prévenu vous donne mais si vous ne voulez plus quelque chose vous répondez simplement RIEN. Après cette mise au point, le président donne la parole au procureur pour ses réquisitions. Procureur : Merci monsieur le président ! Après analyse des faits, permettez-moi monsieur le président de m’exprimer en ces termes. Le prévenu ici devant vous est une perte pour la nation. En effet, il y a plus de deux semaines qu’il est en prison pour avoir volé deux poulets. Alors qu’en prison il a droit à deux repas par jour et pour chaque repas il a droit à un demi-poulet. Donc si nous faisons le point de ce qu’il a déjà consommé en matière de poulets, cela dépasse deux poulets. Le comble, l’argent qui le nourrit, c’est votre argent, c’est notre argent. Pour conclure monsieur le président, je demande que le tribunal le condamne à 12 mois d’emprisonnement dont 8 fermes et à 100.000 francs d’amende ! Après les réquisitions du procureur toute la salle se met à rire. Reprenant la parole, le président déclare : Le tribunal statuant publiquement, contradictoirement en matière pénale et en premier ressort, reçoit le ministère public en son action et retient le nommé Didier dans les liens de la prévention de vol, le condamne à 12 mois d’emprisonnement dont 8 fermes, 4 assortis de sursis et 100.000 francs d’amende. Esaïe DAAGUE
Journaliste - chroniqueur judiciaire |
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Décembre 2024
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